jeudi 18 novembre 2010

Seule la vérité importe, et un sac de haricots.

Vous n'aurez pas manqué de remarquer, car depuis le temps vous êtes devenu un lecteur perspicace et attentif au moindre détail susceptible de révéler un élément inconnu que vous auriez alors la joie de découvrir avec délectation (oui, exactement, vous pensez comme moi à cet exemple frappant, cet article de juillet titré « Ca faisait longtemps… » dont le code source comprend la fameuse surprise cachée, que l'on peut trouver en affichant ledit code et en y cherchant « surprise »), vous félicitant ainsi de la présence d'esprit (phrase longue, au fait, vous aviez remarqué ?) dont vous avez fait preuve et de l'indéniable supériorité de vos capacités cognitives face à celles d'hypothétiques autres lecteurs qui seraient passés à côté d'une telle évidence, vous dites-vous avec un petit rire narquois faisant montre à votre meuble de bureau (seul locuteur disponible dans l'immédiateté de ce moment précis où vous exhumez cette découverte révolutionnaire à vos yeux et aux yeux de l'humanité toute entière, pensez-vous du haut de votre arrogance) de toute l'étendue de votre satisfaction procurée par l'irréfutable certitude que vous êtes au-dessus, pour utiliser une typographie de philosophe pathologique, vous n'aurez pas manqué de remarquer, donc (cette façon de reprendre le cours de la phrase apparaît comme excessivement indulgente ; on aurait très bien pu envisager de ne rien rappeler du tout, laissant ainsi au lecteur le soin de compter les virgules) (d'ailleurs, reprenons la phrase initiale et passons sous silence cette aide horriblement complaisante), pour utiliser une typographie de philosophe pathologique, que le titre est écrit en étranger. (Ceci dit, certaines parties de cet article sont lisibles.)

Pourquoi ?

Simple : j'avais de sérieux doutes à propos de la syntaxe franchouillarde de cette même proposition. J'ai donc préféré procéder à un évitement biaisagéeusistique de cette épineuse question (tout le contraire de la suite, notez).
Et dans le cas où vous auriez pris la peine de comprendre la première phrase (les gens comme ça existent, j'en ai rencontré), il est fort possible que tout ceci vous soit toujours parfaitement obscur. Sachez donc que le titre premier de cet amas textuel était plutôt du genre « All I need is a cat ». D'où l'introduction.

La suite toute entière est contenue dans ces points suspendus (j'ai toujours trouvé ça fascinant, quantiquement parlant) :


Basique, le principe. Odieusement simple, pourrait-on le qualifier de. Et même outranssièrement univoque.
Le voici donc, le vrai, l'unique, l'authentique principe de cet article :
• un chat
• une situation épineuse
• Que faire ?

Véritable guide de survie à l'attention des baroudeurs de tout poil et de toutes moustaches, ce petit traité vous offre un voyage gratuit et antipuces aux confins de l'espace connu. Et on sourit, bon Dieu !
(Achat recommandé.)

(insupportable, non ? comme tout gif animé, me direz-vous… mais celui-ci a un petit air vicieux qui n'arrange rien)



Première situation, donc : sur une île déserte.

D'abord, la solution de simplicité, applicable par le premier imbécile venu (par les autres aussi, ceci dit). Et pour cause : tout (ou approchant) repose sur le chat. La seule chose que vous ayez à faire est de l'envoyer patrouiller sur l'île à la recherche d'un truc potentiellement utile. Si le chat revient en compagnie d'une forme de vie extraterrestre, on essaie de le troquer contre un moyen de transport amphibie bien de chez eux. Sinon, on attend que le chat revienne en compagnie d'une forme de vie extraterrestre. Dans le cas où l'animal serait métaphoriquement le coryphée d'un peuple d'incapables pure souche, reste la possibilité d'en faire un ragoût aux fruits exotiques.

Exposons une seconde façon de solutionner (ce mot est abominablement laid) ceci en un tournemain d'une insolente désinvolture. Cette fois-ci, les enfants, il s'agit de faire étalage d'un peu plus de classe et de couillisme. Si votre chat est une chatte pleine (condition sine qua non de la mise en place de l'« Opération Phaseolus »), alors tout est possible, pour peu que vous ayez du talent et de l'audace (et un sac de haricots).
Et maintenant, le vif du sujet : le mode opératoire détaillé de l'OP. Soyez attentif, votre avenir est en jeu. La première phase de cette méthode sera essentiellement consacrée au repérage : dès que vous aurez mis la patte sur un nid douillet pour la future mère, vous vous consacrerez à la découverte de l'île. Les moindres chiures de ses recoins devront rapidement vous être aussi familiers que votre La-soupe-est-froide. Ceci est indispensable à la bonne marche de l'Opération Phaseolus. Profitez bien de cette étape d'exploration vivifiante et régénératrice, car la suite des opérations sera autrement plus éprouvante. En effet, les chatons seront bientôt adultes. Et vous aurez à peine le temps de dire « putain ça grandit vachement v… » que déjà ils seront occupés à assurer leur descendance (détournez les yeux de leur orgie copulative, c'est votre bonne éducation qui vous parle). Inéluctablement, une seconde génération de félidés naîtra dans les faisceaux bienfaisants de vos yeux paternels (dans lesquels on verrait briller la sombre lueur d'une convoitise muette, en regardant mieux). Et, vous l'aviez deviné (parce que vous êtes très fort) : aucune raison que ça s'arrête là. Le cycle générationnel se poursuivra sous votre houlette attentive d'éleveur de chats en herbe, jusqu'à ce qu'un jour vous vous trouviez à la tête d'un véritable empire félinesque, fort de millions de sujets fidèles. Alors attelez-vous à la tâche, la véritable tâche, celle qui vous guidera vers une gloire éternelle et qui laissera dans la poussière de l'histoire l'empreinte légendaire de Celui-qui-commandait-aux-chats…
Choisissez d'abord une dizaine desdits animaux (est-il besoin de répéter que… ce sont des chats ?) pour vous épauler dans les lourdes responsabilités qui vous attendent au tournant ; dix chats qui seront vos porte-parole, vos plus fidèles collaborateurs ; dix chats avec lesquels vous traverserez l'adversité, les gloires et les déchéances ; dix chats qui porteront avec vous le poids du destin ; dix chats qui deviendront vos seuls amis ; dix chats en qui vous ne pourrez plus jamais avoir confiance (comme dirait Papa Machiavel). Vous les instruirez, vous leur apprendrez le monde, vous leur enseignerez toutes les ficelles de la perfidie humaine. Puis le jour où vous les saurez prêts à s'engager avec vous sur les chemins de la victoire, convoquez-les en une assemblée solennelle. C'est alors que vous leur parlerez de l'Opération Phaseolus…
(Quand vous serez maître du monde, envoyez-moi une carte.)


Ensuite, un petit challenge qui n'est pas à négliger : lors d'une conférence du Dr. Spino traitant du métabolisme de la loutre décadente au cours de la troisième moitié du Haut Âge.

En ce cas particulier de circonstances, il convient de respecter un certain protocole. Situation initiale : on est assis, au cœur de la salle attentive, le chat ronronnant sur les genoux. On médite alors quelques instants afin de retrouver le calme intérieur indispensable à l'exécution de la séquence événementielle. Puis on ramène lentement sa main droite sous le ventre de l'animal. On le soulève avec délicatesse, tout en le soutenant soigneusement de l'autre main. Dans le même temps on se lève avec assurance. On repousse sa chaise d'un geste franc et mesuré, on se tient droit face à la sourde indignation qui émane peu à peu de la foule. À ce moment-là, le Dr. Spino devrait être plongé dans un silence scrutateur. On n'y prête pas attention : toujours calme et concentré, on ramène son bras droit loin derrière soi. Puis on tend peu à peu ses muscles, dans l'attente du grand final. Au moment où la tension atteint son paroxysme, on la laisse jaillir avec une violence entièrement maîtrisée, et dans un élan fluide et harmonieux on projette puissamment le chat en direction du conférencier. En toute logique, cet enchaînement d'actions, si exécuté avec succès, devrait mettre fin à tout ceci (ou tout du moins vous faire expulser de la salle).


Et maintenant, seul sous le feu ennemi.

Ici, c'est d'une situation encore plus délicate qu'il s'agit, puisque la moindre erreur peut vous amener à un face à face improvisé avec la Mort. Bien évidemment, votre fin serait moins douloureuse que s'il s'agissait de croupir dans les geôles du Dr. Spino jusqu'à la fin de vos tristes jours, mais tout de même.

Voici une proposition ne manquant pas d'élégance : subitement, vous hurlez quelque chose d'incompréhensible à vos assaillants. Ceux-ci, en toute logique (mais si), cessent le feu et se mettent à écouter avec attention ce que vous avez à dire de tellement important. C'est alors que vous agitez le chat au-dessus de votre tête en signe de paix, tout en vous levant avec prudence et en sortant de votre abri. Face à l'ennemi qui reste un moment interdit devant le chat, vous profitez de l'effet de surprise et commencez à déclamer des poèmes d'une voix forte et passionnée. Si l'affaire a été menée avec style, l'auditoire est conquis, séduit par le velouté de votre voix. Mais ce n'est pas fini, rien n'est encore joué…
En effet : tout repose désormais entre vos mains, et il ne tient qu'à vous de profiter de cet avantage ou de le laisser vous passer sous le nasal. C'est alors que le chat, que vous aviez laissé plus tôt dans la narration, peut vous rejoindre afin de vous épauler dans votre entreprise : pendant que vous continuez à captiver le soldat d'en face, le chat se faufile discrètement parmi les barricades et s'approche de la ligne ennemie. Parvenu sur eux, il entreprend de les mettre hors d'état de nuire (ou même, de respirer convenablement), un par un, méthodiquement, avec soin et sans bruit. On fera toutefois attention à limiter les dégâts du chat, afin que les braves soldats d'en face soient toujours en mesure d'entendre les paroles de l'orateur. Un orateur sans auditoire est comme un vendeur de confiseries sans trigonocéphale.

Dans une optique vachement moins portée sur la finesse, il existe une platée d'autres voies. Mais au sein de ce panel infini qui s'étale devant vous, il y a cette petite fiche, juste là. Vous la voyez ? Elle paraît si innocente, une simple fiche parmi des millions d'autres. Innocente ? Oh non… rien de moins innocent que cette insignifiante petite solution. Cette possibilité classée écarlate dans 98% des systèmes connus… Cette méthode que certains préfèreraient oublier… La « Spéciale Wachster ».
Il faut savoir que cette méthode est entrée depuis longtemps au panthéon de la Ligue des Solutionneurs, et figure encore parmi les hauts faits les plus remarquables de l'histoire, en même temps que les plus terrifiants… Elle tient son nom d'un officier de l'Ordre des Lunettes Bleues : Albert Wachster. Un jour, cet officier, illustre inconnu au bataillon, se trouva acculé par l'ennemi, dernier survivant de sa compagnie. Son esprit fit alors la rencontre d'une idée géniale : combiner chat et ration de survie en une arme de destruction massive. Le jour où cet éclair de génie le frappa, Albert Wachster parvint à mettre une armée entière en déroute, exterminant en quelques instants plus de la moitié de ses effectifs. Malheureusement une telle puissance dévastatrice ne pouvait être utilisée sans conséquences… Sa création se retourna contre lui avant de s'autodétruire en laissant derrière elle un cratère gigantesque, connu aujourd'hui sous le nom de « cratère Wachster ».
Depuis lors, tout a été fait pour que le monde oublie cette solution. Mais aucune mémoire n'ignore que la menace plane et qu'un jour la « spéciale Wachster » peut ressurgir du passé pour venir semer la désolation.
M'enfin, ça reste une solution ; c'est vous qui voyez.


Autre situation : partie de bridge avec des amies de votre grande tante.

Cette fois encore, la résolution de l'énigme ne saute pas aux yeux (aucun rapport avec le chat et le conférencier, non non). Toutefois on remarque deux choses essentielles :
- premièrement, le cadre du drame, dans le plus pur style salon-encombré-de-bibelots, peut devenir le théâtre de merveilles d'inventivité ; nous n'en parlerons pas, mais songez-y…
- d'autre part, le chat dispose dans ce cas tout particulier d'une aura toute particulière (c'est bien connu : chat + vieille = toutuntasdetrucsmarrants) qui vous offrira certainement de nouvelles perspectives rayonnantes, illuminant votre imagination

Et là, c'est votre ingéniosité qui vous vient en aide. Elle vous souffle d'abord quelque chose à l'oreille, juste deux ou trois mots. Et là, vous vous dites « Mais oui ! comment ai-je pu ne pas y penser Pluto ? » car vous préférez prétendre qu'il s'agit de votre part d'une simple erreur d'inattention. Ce que l'ingéniosité vous a soufflé est enfantin ; vous vous préparez à le mettre en application. La Démoniaque Tante en Chef commence déjà à battre les cartes avec un air menaçant qui vous fait bien comprendre que t'as aucune chance de fuir les longues heures de torture qui t'attendent, petit con ; les autres vous observent avec un air sournois franchement assumé. Mais vous, vous vous savez déjà triomphant. Vous faites surgir, comme un atout d'une manche, le chat de sous la table, et c'est au son des « Oooooh ! », des « Aaaaah ! » et autres « Qu'il est mignon ! » que vous célébrez votre victoire. Vous plantez alors votre regard qui sourit en coin dans les yeux de la Démoniaque Tante en Chef. Elle soutient votre feu glorieux quelques instants avant d'abandonner à contrecœur son paquet de cartes pour aller tâter du poil soyeux de votre chat persan magnifiquement racé*.

Une autre manière d'utiliser judicieusement votre chat est de le faire complice de votre plan machiavélique. Cette fois-ci, vous avez décidé de les pousser à bout de nerfs afin qu'elles décident d'écourter la séance infernale. Vous convenez donc avec votre chat d'un mode de communication discret et efficace, puis la partie commence. Votre chat va subrepticement se percher tour à tour sur les épaules des trois joueuses chevronnées, et vous indiquer la composition de leurs mains au moyen d'un système sophistiqués de miaulements, de râles et de crissements de griffes. Et c'est au moyen de ce stratagème parfaitement indétectable que vous serez en mesure de prendre le contrôle total de la partie. La Démoniaque Tante en Chef elle-même ne pourra résister longtemps à l'humiliation de se voir ainsi rabaissée dans un domaine où d'ordinaire elle excelle. Elle vous lancera souvent des regards assassins mêlés d'accusations rageuses, mais ne pouvant rien prouver contre vous (qui soupçonnerait un chat ?) elle sera réduite au silence et à la rage de contempler votre visage narquois. Planté face à elle, vous savourerez le goût de la toute-puissance. Jusqu'à ce qu'inéluctablement elles finissent par craquer.
Ce n'est qu'une question de temps.


Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, cette petite excursion touche à sa fin. La température au dehors approche les pas mal de degrés Wachster, le fond de l'air est bleu et le soleil n'est désormais plus jaune. Nous espérons que la ballade vous a été agréable ; nous vous souhaitons un bon appétit et une bonne fin de fleuret. Que les vents vous soient favorables.




* Note : cette méthode n'a aucunement été approuvée dans le cadre de l'utilisation d'un chat de gouttière vaguement miteux. Solutions&Cie© ne pourra être en aucun cas tenue pour responsable en cas d'échec.

Challenge : compter le nombre d'occurrences de « chat » dans ce texte.

Le CDCU a encore frappé.

Même que je vous aime encore un peu, et que voici un lien. En principe, tout amateur de séries qui se respecte devrait en être particulièrement ravi. Si ledit amateur n'est pas ébloui de bonheur, c'est qu'il n'a pas de cœur. Voilà.

Au fait, Lapinou a mis fin à sa grève, mais là il est parti manger.

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